[Evénement] L’Anses annonce le retrait des principaux usages des herbicides à base de S-métolachlor

Date :

Générations Futures salue cette décision qui répond partiellement à ses demandes mais dénonce la lenteur du processus d’évaluation ayant conduit à cette décision.

Rappel du Contexte sur le S-Métolachlor

Le S-métolachlore est un herbicide principalement utilisé sur grandes cultures de maïs, soja ou tournesol. Autorisé depuis 2005, c’est le 3ème herbicide le plus utilisé en France derrière le glyphosate et le prosulfocarbe. Les métabolites de cette substance qui se forment dans le sol contaminent fortement les eaux souterraines et également l’eau potable. En 2021, 3.4 millions de français ont ainsi bu une eau non conforme à cause de la présence de l’ESA métolachlore, principal métabolite du S-métolachlore. C’est pourquoi Générations Futures avait demandé officiellement le retrait des pesticides à base de S-métolachlore dès septembre 2022 dans une lettre d’avocat de demande officielle à l’Anses et dans un rapport publié le 22 septembre 2022.

Arrivant à expiration le 31 mars 2015, la substance est en cours de réévaluation au niveau européen depuis 8 ans ! Dans ce contexte, de nouvelles études de toxicologie et épidémiologiques ont été analysées. Ces nouvelles données, ont conduit l’agence européenne des produits chimiques (ECHA) à classer le S-métolachlore en tant que cancérigène suspecté en juin 2022.

Les métabolites du S-métolachlore aujourd’hui jugés pertinents pour les eaux souterraines par l’ANSES… 

Cette nouvelle classification du S-métolachlore a de grandes conséquences sur l’autorisation de mise sur le marché des produits le contenant. Ce qui change ? Alors que jusqu’à présent les métabolites du S-métolachlore étaient jugés non pertinents pour les eaux souterraines, ils sont maintenant, suite à cette classification en cancérigène suspecté, considérés comme pertinents pour les eaux souterraines. La méthodologie européenne servant à évaluer la pertinence des métabolites lors de l’évaluation des AMM est en effet très claire : lorsque la substance active est classée cancérigène suspecté, l’industriel doit apporter les preuves que ses métabolites ne le sont pas eux-mêmes. Comme aucune donnée sur les métabolites n’a été apportée par Syngenta, les métabolites sont donc jugés par l’Anses pertinents par précaution, les preuves de leur non-classement étant absentes. Or, pour qu’un usage d’un produit soit autorisé, les métabolites pertinents doivent avoir des concentrations prévisibles dans les eaux souterraines < 0.1 µg/L. D’après les modélisations réalisées par l’Anses présentées ce jour, les concentrations prévisibles sont bien supérieures à cette valeur (jusqu’à 99.4 µg/L pour l’ESA métolachlore suite à un usage sur maïs en prélevée).

Pourquoi l’Anses prend cette décision ?

Ainsi, l’Anses, en suivant la réglementation et les méthodologies européennes décide du retrait de ces usages conduisant à des teneurs dans les eaux souterraines > 0.1 µg/L, usages largement majoritaires. C’est une victoire pour Générations Futures car nous avons demandé à l’ANSES le retrait de tous les produits à base de S-métolachlore depuis septembre 2022 par lettre d’avocat en précisant que la nouvelle classification de la substance ne pouvait pas rester sans conséquences. Aujourd’hui même si le retrait n’est pas total, il va concerner de nombreux usages.

Cette décision arrive avant que l’EFSA ait rendu ses conclusions sur le dossier et en particulier ses conclusions sur la pertinence des métabolites. Générations Futures salue cette initiative de l’Anses et cette anticipation d’une probable interdiction au niveau européen de la substance (pour les raisons que nous venons d’expliquer). Contrairement à ce qui nous est souvent répondu cet avis montre que les autorités nationales ont le pouvoir de prendre des décisions sur les autorisations des produits sans attendre les conclusions de l’Europe sur les substances actives. (Cette initiative pourrait donc également être prise dans le cas du glyphosate par exemple…).

« Si nous saluons cet avis, nous tenons toutefois à souligner la lenteur du processus d’évaluation, que ce soit par l’Europe ou par l’Anses. » déclare Pauline Cervan, toxicologue en charge des questions scientifiques et règlementaire chez Générations Futures. Pour rappel, dès 2004, la Commission alertait déjà les Etats Membres sur les risques de contamination par les métabolites des nappes phréatiques et par conséquent de l’eau potable. Aujourd’hui cela fait 8 ans que le dossier est en cours de réévaluation. Le potentiel cancérigène du S-métolachlore est reconnu par l’Anses depuis au moins 2021. Pourquoi avoir alors attendu encore 2 ans pour annoncer le retrait de ces produits ? « Cette lenteur du processus d’évaluation européen est responsable de tant d’années de contamination des eaux souterraines et potables par les métabolites. » conclut François Veillerette, porte-parole de Générations Futures.

Information complète sur le site de Générations Futures.